La plus riche des régions de Chine est une campagne des eaux, quadrillée de canaux, crevées de dizaines de lacs et d’étangs, où le trafic des péniches et des sampans bat la mesure de la prospérité. A la différence des cités du nord, centres administratifs engoncés dans leurs portes et leurs murailles, les cités du bas Yangzi grandirent sans autre protocole que le sens des affaires des riches négociants, la fantaisie des mandarins retirés, qui s’y faisaient aménager vastes demeures et jardins de poche, et le prestige des grands monastères. Depuis l’ouverture de la Chine au monde, le Jiangnan, le sud du delta du Yangzi, a cultivé sa vocation de toujours : un pôle économique à la remorque de Shanghai. Depuis les années 1990, la région a connu un développement économique particulièrement rapide, qui en a fait, entre autres, la zone portuaire la plus active du monde. Si elle conserve de beaux vestiges historiques, son identité est ailleurs. Shanghai n'a jamais été tournée vers le passé : elle regarde vers l'avenir.ge d'Orient et d'Occident et avide de nouveauté, c'est une ville cosmopolite. L'endroit rêvé pour goûter au futur proche...
La perle de l’Orient
L’acte de naissance de cette municipalité de 6 340 km2, entièrement urbanisée et peuplée de 14,9 millions d’habitants, est lié à la défaite chinoise à la fin de la première guerre de l’Opium (1842). Pour sa victoire, l’Occident vainqueur réclama cinq ports francs : Canton, Ningbo, Fuzhou, Amoy et Shanghai. Et vint le temps des concessions. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, on accédait à Shanghai par la mer, en remontant l’estuaire du Yangzi, puis son affluent, le Huangpu, pour entrer enfin dans le port… aujourd’hui l’un des plus importants du monde.
• La Chine maoïste : Elle l’a savouré d’autant plus qu’elle revenait de loin. Cité du luxe et du capital durant les Années folles, quand on la surnommait la perle de l’Orient, elle fut montrée du doigt par la Chine maoïste et punie de ses excès par une longue traversée du désert. Shanghai s’endormait quand s’éveillait Hong Kong. Elle s’est tout à fait réveillée le 18 avril 1990, quand fut lancée la nouvelle zone économique de Pudong : cette ancienne friche industrielle de la rive droite du Huangpu hisse aujourd’hui sur le ciel une skyline orgueilleuse et futuriste.
• Rive gauche, rive droite : Le Bund, front de fleuve de 1 km, vitrine de Shanghai avec une cinquantaine de gratte-ciel, version 1930 : c’est ainsi que les passagers arrivant en paquebot découvraient la ville. Une corniche plantée d’arbres, suspendue au-dessus de la berge du Huangpu, met à portée de regard les audaces architecturales de ces anciens sièges de banques et compagnies étrangères. De l’autre côté du fleuve, Lujiazui, le quartier de la finance de Pudong, déploie bien plus haut, comme autant de défis lancés au 3e millénaire, sa batterie de gratte-ciels high-tech.
• Place du Peuple : Au bout de la rue de Nankin, elle affiche la métamorphose de Shanghai en constructions de prestige. Face au siège de la municipalité, le musée de Shanghai est le plus réussi des musées chinois, offrant un parcours très pédagogique sur trois étages, autour des bronzes archaïques, de la céramique, de la sculpture, de la peinture et de la calligraphie. Le musée d’Art de Shanghai s’anime lors d’expositions temporaires, mises en scènes dans de somptueuses muséographies. L’Opéra déploie ses ailes blanches sur une structure métallique...
Souvenirs sous les platanes
Sous le nom de rue du Maréchal-Joffre, l’actuelle avenue Huaihai (Huaihai zhonglu) traversait la concession française. Elle en a gardé ses platanes et, dans les rues alentour, des demeures où s’est tramé le destin de la Chine. Le 76 Xingye lu, accueillit une réunion clandestine, interdite par la police de la concession française, en 1921. C’était la première conférence d’une toute jeune organisation, le Parti communiste chinois, à laquelle participait un certain Mao Zedong. Autour, le pâté de maisons est devenu Xin Tian Di, le « Nouveau Monde », quartier chic de shikumen (anciennes maisons en brique et pierre shanghaiennes) réhabilités pour loger bars et restaurants hype. L’un d’eux a été aménagé en musée du Shanghai des années folles (Shikumen Open House, 181 Taikang lu. Sur Xizang lu, non loin du bric-à-brac des puces de Dongtai lu, se déploie un marché aux oiseaux. L’ancienne enclave chinoise des concessions étrangères a été entièrement engloutie sous les pelleteuses.